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Repères sur des gestes professionnels et script de séance

mercredi 23 juin 2021, par phil

- La préparation s’effectue sur deux dimensions simultanée : l’individuel et le collectif. Il s’agit d’organiser, de planifier une séance d’apprentissage conciliant le groupe d’élève qui va travailler et les aspects individuels de la tâche scolaire. Dans cette perspective, l’enseignant doit veiller à se réserver des temps consacrés à des échanges duels, un entretien avec un élève, une aide... dans le déroulement général d’une classe où tout le monde travail en individuel et collectif. Aussi, l’alternance des modes de travail (individuel, collectif à 2 ou/et à 4, réflexion individuelle, restitution collective...), comme la diversification des supports et des tâches scolaires sont un facteur facilitateur et régulateur d’étayages individuels. Lorsque les élèves sont en travail individuel, l’enseignant peut aider certains élèves selon leurs difficultés rencontrées ou prendre des indices sur la manière de progresser dans une tâche et restituer par exemple à la classe entière des explications supplémentaires. L’alternance des modes de travail permet à l’enseignant de se situer pendant quelques minutes ci et là dans un rôle de personne ressource ou de personne qui s’informe sur la manière pour les élèves de progresser dans les apprentissages

- Le dispositif pédagogique à la « situation ouverte » :

- Du coup, la séquence relève d’un dispositif pédagogique de « situation ouverte ». La situation ouverte s’oppose à la situation fermée : car il y a plusieurs réponses possibles de la part des élèves face à une question, face à un problème posé. Dans ce dispositif, les élèves sont amenés à émettre des hypothèses, à rechercher des solutions, à expérimenter, à tâtonner pour in fine découvrir une réponse qu’ils peuvent confronter à celle d’autres camarades, ou celle de la classe. Ces multiples réponses favorisent les confrontations et les débats entre les élèves. Une situation fermée est une situation de contrôle de connaissances déclaratives, par ex. donner une date historique : 1515 ou faire conjuguer un verbe au présent. En revanche, demander en littérature un avis sur le comportement d’un personnage est une situation ouverte à plusieurs réponses à débattre en classe. L’avantage essentiel de la situation ouverte est pour l’enseignant la possibilité de s’informer sur les représentations des élèves sur un sujet donné pour d’autant mieux faire évoluer ou transformer ces représentations. Parfois, cela offre l’opportunité de recevoir des informations sur les enfants auxquelles on a pas pensé : par ex. devant tel problème un enfant se situe sur un registre affectif. Lequel n’est pas le registre attendu pour que l’élève soit en capacité d’interroger l’objet scolaire à apprendre, soit en capacité de penser l’objet scolaire enseigné. Il convient que l’élève se situe à un niveau de la tâche et à un niveau de sa signification afin que se développe la secondarisation attendue ; c’est-à-dire le passage de l’usage à l’objet, le passage de l’objet de savoir enseigné en objet de savoir appris. Le programme scolaire d’une année de classe ne peut être enseigné avec cette seule méthodologie, seules les notions clefs de l’année d’apprentissage le nécessitent. Pour les autres moments, les situations didactiques peuvent être plus classiques, d’autant si les objets étudiés sont connexes à ceux déjà appris en situation ouverte.

- En conclusion, les niveaux de connaissances, les rapports à la discipline scolaire, les compétences varient beaucoup d’un élève à l’autre. Une situation ouverte d’enseignement / apprentissage favorise la construction progressive de connaissances du côté des élèves ; et la prise d’indices pour l’enseignant sur la cognition des élèves. Cela permet d’appréhender les représentations des élèves, les pré-requis des élèves, leurs difficultés et handicaps pour apprendre de manière à réguler la situation didactique de classe. Ce sont ces principes qui guident le script très général d’une séquence, proposé ci-dessous, plus ou moins transférable selon les disciplines et les niveaux des élèves. Ce script convoque quelques gestes professionnels qui lui donnent tout son sens.

- Proposition de script de classe (déroulement type d’une leçon) :

- INTRODUIRE

- 1- Inscrire au tableau le thème ou le sujet de la séquence, de la leçon,

- 2- Lier la leçon aux séances précédentes, effectuer un tissage avec ce que les élèves ont déjà fait ou savent déjà,

- 3- Faire rapidement émerger leurs représentations, vérifier les pré-requis nécessaires à l’activité,

- 4- Formuler la consigne : formulation orale doublée par une formulation écrite (pour les élèves auditifs/visuels)

- 5- Faire reformuler la consigne (afin de s’assurer de sa compréhension, ou constater l’écart entre la demande enseignante et la perception de l’élève), éventuellement redire la consigne pour remédier à des écarts de compréhension,

- 6- Expliciter le mode travail : individuel/collectif ; comment les élèves vont devoir s’y prendre pour réaliser la tâche scolaire demandée,

- 7- Lister le matériel qu’il faut avoir à disposition pour effectuer la tâche scolaire.

- DEVELOPPER

- 8- Mettre les élèves en « situation ouverte » de travail : les conduire à se poser des questions, à rechercher des solutions à partir d’une tâche sollicitant leur activité et leur réflexion (travail individuel puis collectif, retour à l’individuel et au collectif, réfléchir tout seul, confronter et discuter des solutions les meilleurs à 2 ou à 4 ; situation de recherche, de manipulation, de classement, de résolution d’un problème mathématique – par exemple « 1500-250 = ? sans poser » ou d’un problème langagier – par exemple : « L’as, tu l’as ? » Quel GS/GV, quelle orthographe ?.
- Ce moment de travail permet à l’enseignant de vérifier le travail des élèves, de répondre à leurs demandes, d’aider les élèves particulièrement en difficultés. L’enseignant régule le travail collectif et individuel, il régule les interactions, les échanges. Il fait en sorte que les élèves s’approprient la tâche scolaire et se donnent comme but de réussir la tâche scolaire demandée, de résoudre le problème. Il convient de prévoir que les élèves changent de mode d’activité ou de support (collectif, individuel, lire, écrire, regarder, confronter avec son voisin, restituer à la classe, manipuler, classer, ...) toutes les 10/15 minutes, la phase de « situation ouverte » de recherches, réflexions, confrontations ne devant excéder une trentaine de minutes.

- 9- Établir des bilans d’étape réguliers (toutes les 10 mn pendant 2 mn), en interrogeant les élèves dans le cadre d’une restitution collective : « qu’avez-vous fait ? », « qu’avez-vous trouvé ? », « où êtes-vous parvenu dans la résolution de ce problème ? ». Ces petits bilans permettent d’effectuer des pauses, d’effectuer une courte synthèse, de rebondir sur une difficulté et de relancer une dynamique de travail.

- CONCLURE

- 10- Effectuer une restitution collective finale du travail effectué à l’oral : « qu’avez-vous trouvé ? » et valider/invalider les propositions de solutions des élèves qui doivent être justifiées, si les élèves se trompent ou n’apportent pas de réponse, donner la réponse attendue,

- 11- Rédiger, si possible, avec le concours des élèves, une trace écrite ; il s’agit d’institutionnaliser, de fixer le savoir par une trace écrite ; même si la réponse n’a pas été trouvée, il convient de l’écrire au tableau, pour le moins ; les élèves peuvent rédiger au préalable leur trace écrite ou « règle » sur le cahier de brouillon avant une restitution ; cette trace écrite peut être notée dans le « cahier du jour » ou bien sur une « affiche outil » pour la classe,

- 12- Faire expliciter aux élèves le déroulement de la séance et leur apprentissage : afin de connaître l’avancée des apprentissages des élèves, obtenir des indices sur leur apprentissage et développer ultérieurement des remédiations ou simplement poursuivre l’acquisition d’une connaissance et compétence ; cela se résume en 3 questions : « qu’avez-vous fait ? », « comment avez-vous fait ? », « qu’avez-vous retenu ou appris ? »

- Ces questions permettent de fixer une mémoire collective de l’activité engagée, de s’intéresser aux procédures utilisées par les élèves : leur manière de résoudre un problème renseigne plus sur ce qu’ils apprennent que le résultat seul (qui peut être le fait du hasard, du copiage sur le voisin ou le résultat juste d’une procédure erronée non reproductible dans une autre situation). La dernière question permet de vérifier si les élèves ont appris une connaissance et/ou une compétence visée(s) ; ou bien s’ils demeurent à des « traits de surface » de l’activité (du genre « on a souligné en rouge des sujets », au lieu de « on a appris à identifier le sujet de la phrase, qui peut être un mot ou un groupe de mots, qui peut comprendre un déterminant et un nom... »). Il convient que les élèves ne s’arrêtent pas au « faire », au seul tracé, ou réécriture, ou autre manipulation qui ne sont que les supports à un apprentissage d’une notion donnée, sur laquelle ils doivent s’autoriser à exercer des activités de pensée. L’élève ne doit pas retenir, en fin de séance, l’activité même qu’il a effectué mais la notion que l’activité a révélée.

- Il convient de conclure la séance d’une manière ou d’une autre, même s’il manque du temps, même si les élèves n’ont pas apporté les réponses attendues. Cette conclusion peut, cela dit, se réduire à une simple phrase qui sera une synthèse de la séance, écrite au tableau, à partir de laquelle la classe pourra redémarrer la prochaine fois.

- Des gestes professionnels chez l’enseignant :

- Nous retrouvons dans ce script des gestes professionnels de tissage, contextualisation, d’émergence des représentations et pré-requis, de définition du travail souhaité, de dévolution (appropriation de la tâche par les élèves), de régulation du travail collectif et d’étayage individuel, de reformulation, d’institutionnalisation et de secondarisation (passage des objets enseignés aux objets exercés puis aux objets appris ; en d’autres termes passage de l’agir à la théorie, du « faire » au « comprendre » qui est une visée fondamentale du métier).

- Cette suggestion de script de séance de classe met les élèves en situation d’apprentissage actif, en situation de réflexion au moyen d’activités de classements, de manipulations, d’observations... guidées par l’enseignant. Elle suppose une organisation de la classe qui n’est pas frontale, et un positionnement du maître « planificateur », « animateur » et « personne ressource » pour faire apprendre. La fiche de préparation est un outil pour penser un dispositif approprié pour la notion étudiée et les élèves, dont l’enseignant connaît les capacités, la zone de proche développement.

Post-Scriptum
Philippe Clauzard, CPC, 2009