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La classe ludique

mercredi 24 mars 2021, par phil

Apprend on mieux en jouant ? Est-ce une activité nouvelle en éducation ? Le jeu motive t-il toujours les élèves ? L’intelligence artificielle va t-elle remplacer les enseignants ? Autant de mythes qui sont expertisés par Eric Sanchez (Université de Fribourg) et Margarida Romero (Université de la Côte d’Azur) dans un petit livre (Apprendre en jouant, éditions Retz). Ils examinent 9 mythes sur le jeu en éducation en les confrontant aux réalités de la recherche. Ce faisant, ils proposent une réflexion pointue sur le jeu éducatif et, exemples de jeu à l’appui, forment les enseignants à l’utilisation raisonnée du jeu en classe. Eric Sanchez fait un point sur quelques enseignements du livre.

On observe un grand intérêt pour le jeu chez les éducateurs aujourd’hui. D’où vient-il ? Il y a d’abord le fait que le jeu entre dans les recettes miracles. On a des problèmes pédagogiques et du mal à les résoudre. Et on se dit que le jeu peut peut-être être une recette miracle car on a vécu une situation où ça avait marché. Et puis on est dans une époque de meilleure acceptabilité du jeu dans notre société. Après des siècles où le jeu était repoussé par la tradition catholique hostile au plaisir et au hasard, le culture ludique se développe. Tout le monde joue plus ou moins, d’autant qu’il y a une plus grande diversité des jeux.

Dans le livre vous montrez que le jeu est très ancien. Mais aujourd’hui on a des jeux numériques qui n’existaient pas avant. Est-ce que cela ne change pas tout ? Ne vivons nous pas une nouvelle étape ?

Une exposition au musée gallo romain de Lyon montre que les jeux de cette époque existent toujours. Le numérique donne des possibilités totalement nouvelles en terme de game play, d’accès, de forme de jeu. Les formes ludiques ont changé. Mais les mécaniques ludiques sont restées les mêmes : la compétition, le hasard... Le numérique conduit à une expansion des jeux. Il fait du jeu un vrai secteur culturel en plein développement. Pour autant peut-on parler de jeux nouveaux ? Il y a une autre nouveauté : les enseignants, avec les escape games par exemple, ont la possibilité de créer leurs jeux pour leur classe ce qui n’était pas possible avant.

S’il y a un grand intérêt pour le jeu, il y a aussi de grandes déceptions. Le jeu a t-il toujours un effet positif sur les apprentissages ?

Je ne suis pas sur. D’abord le jeu crée de l’addiction. C’est un problème important qui touche 5% des joueurs. Il attire l’attention des élèves qui passent trop de temps en jouant aux dépens d’autre chose. Il entre en compétition avec l’éducation. On peut dire que les effets positifs du jeu sont difficiles à mesurer. C’est une erreur de croire qu’on n’apprend simplement en jouant. On n’apprend vraiment que si un éducateur aide à formaliser les savoirs tirés du jeu. Par exemple, on peut jouer à Simcity sans rien comprendre à l’aménagement urbain. Les concepts n’émergent pas tout seuls du jeu. C’est au professeur de les mobiliser. On apprend en fait en réfléchissant sur le jeu lors du debriefing réalisé avec le professeur. C’est le moment important du jeu même si on constate que souvent il est mal fait.

En jouant on n’apprend que les règles du jeu ?

Non. Si on joue à un jeu bien fait qui contient des concepts, avec le debriefing on apprend des choses. Le jeu est un expérience. Un bon exemple est le jeu Telomere, un jeu contre le tabagisme, où les élèves vivent des situations où ils mobilisent des compétences psychosociales. Ensuite l’animateur les aide à réfléchir sur cette expérience. Les élèves peuvent se baser sur cette expérience vécue pour en faire des concepts et penser leur vie.


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