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La pédagogie différenciée

mercredi 10 février 2021, par phil

La pédagogie différenciée part du constat que dans une classe, un professeur doit enseigner à des élèves ou des étudiants ayant des capacités et des modes d’apprentissages très différents. Elle tente de donner une réponse à cette hétérogénéité des classes par des pratiques adaptant à chaque élève les programmes d’études, l’enseignement et le milieu scolaire. Bien souvent, l’enseignant ne va plus être le centre de la classe mais va mettre l’enfant ou l’activité comme intérêt central. De plus, ces pédagogies ont souvent pour but le développement personnel de l’enfant.

- Une des premières expériences de pédagogie différenciée est celle du Plan Dalton élaborée vers 1910 par Helen Parkhurst. Celle ci, devant enseigner à une classe de quarante enfants dont les âges variaient de 8 à 12 ans, mit en place un système de fiches personnalisées permettant pour chacun un plan de travail individuel.

- La méthode de Winnetka perfectionne en 1913 ce système en créant des fiches auto correctives, et en accordant plus d’importance au travail en groupe.

- Ces méthodes arriveront en Europe via les publications du mouvement d’éducation nouvelle. Robert Dottrens s’en inspire lors de la création de l’école du Mail à Genève.

- À la même époque, Célestin Freinet systématise l’utilisation de ces outils d’individualisation, et met au point les fichiers Freinet. Ces fichiers sont encore utilisés dans les classes de l’ICEM. Le journal de l’école fut un outil pédagogique essentiel à sa didactique.

- En 1975, la réforme Haby introduit le collège unique en supprimant les différentes filières (d’après le concept d’hétérogénéité, toutes les classes se valent). La loi propose un remède au problème d’hétérogénéité : la pédagogie différenciée.

- Alors que l’enseignement primaire assume depuis le siècle dernier la formation de l’ensemble de la population, on peut dire que "la pédagogie différenciée est apparue comme un moyen de faire face aux difficultés des premiers apprentissages". C’est un moyen pour permettre à tous les élèves d’atteindre des compétences du niveau considéré et pour le maître de gérer une forte hétérogénéité des niveaux des élèves.

- Dans un dispositif de pédagogie différenciée, l’enseignant :
- repère un objectif à atteindre pour l’ensemble du groupe d’élèves,
- fait le choix d’une grille d’analyse des difficultés des élèves,
- élabore des stratégies pédagogiques en fonction de ces difficultés,
- organise sur une ou plusieurs classes les activités en regroupant les élèves par type de stratégies, par type de besoins ou type de conception.

- Selon Sabine Laurent, " la question des différences entre élèves est diversement appréciée selon les auteurs et les acteurs" On observe :

- bons/moyens/faibles en mathématiques ou en français dans le dispositif dit des groupes de niveau-matière,
- auditifs/visuels pour A. de Lagaranderie,
- inductif/déductif,
- besoin de guidage ou d’indépendance,
- réflexif/impulsif,
- impliqué/détaché, etc.

- Il se pose la question du comment adapter les stratégies aux "profils" des élèves ? Pour certains, il convient de faire varier certaines caractéristiques du dispositif pédagogique. Par exemple, le type de support (texte, image, schéma,...), le type de matériel, le nombre, ou la nature et l’ ordre des questions posées, de prévoir l’alternance entre travail individuel ou en groupe, ou bien entre expérimentation libre ou guidée, etc. Ces conceptions tendent à penser la différenciation en une diversification des supports, de dispositifs, ou des interventions du maître en terme d’étayage. Mais est-ce bien cela diversifier ? Nous posons la question !

- Il nous semble que la différenciation interroge avant tout l’objet que les élèves doivent apprendre : ses caractéristiques et ses difficultés cognitives et didactiques qu’il implique en amont et en aval, elle convoque une grille de lecture par l’enseignant des difficultés observées dans la résolution de tâches données avec cet objet d’apprentissage. Ce qui conduit alors à interroger les élèves sur ce qu’ils font, sur leurs manière de faire, sur leurs difficultés, sur leurs erreurs, sur les manières qu’ils ont employé pour se corriger, etc. Un véritable discours d’explicitation sur le travail de l’élève est alors convoqué.

- Des ouvrages sur la différenciation proposent d’ailleurs des questionnaires ou des entretiens à mener avec les élèves sur leurs méthodes de travail. L’observation de leur comportement, l’analyse des questions qu’ils posent, de leurs erreurs, des demandes d’aides qu’ils formulent, constituent d’autres indices de leurs difficultés.

- Nous conseillons, après consultation d’ouvrages sur le sujet, 3 modalités de différenciation pédagogique.

-  Le GROUPE DE BESOINS est à mettre en place connaissant précisément grâce à des évaluations et des tests les lacunes et les difficultés des élèves, voire leurs procédures erronées. Il s’agit dès lors de concevoir un travail remédiant pour les élèves concernés et des approfondissements pour les autres. On peut imaginer 3 groupes de travail : le travail sera différent d’un groupe à l’autre ; certains reprenant par exemple quelques bases qui leur manquent, d’autres abordant des aspects complémentaires, des élargissements.

- Le GROUPE DE CONCEPTIONS réunit des élèves selon des conceptions identiques à travailler. Pour ce faire, il convient de faire émerger les représentations des élèves au début d’un sujet d’étude et d’organiser des groupes de conceptions en répartissant les élèves par rapport aux obstacles auxquels ils doivent prioritairement s’attaquer. Un travail en relation avec cet objectif, un travail permettant de faire évoluer des conceptions précises à modifier pour apprendre une notion... sera ensuite présenté en grand groupe.

- Les EXERCICES FUSEES A PLUSIEURS ETAGES permet à tous de réaliser l’essentiel (méticuleusement défini au préalable) et à certain d’aller plus loin. Ce dispositif permet aux élèves lents, ou ayant plus de difficultés, de réaliser tout de même un travail cohérent et aux autres de na pas perdre de temps. Les exercices sont adaptés à différents niveaux de difficulté : on donne moins d’items aux uns et plus d’items aux autres, mais ils ont tous les mêmes items ; ils doivent passer tous par les mêmes objectifs d’apprentissage. C’est la procédure de différenciation pédagogique la plus économe à mettre en place en classe.

- Philippe Meirieu effectue deux distinctions : différenciation/individualisation et groupes de besoin/groupes de niveaux. Pour lui, même si la différenciation est un moyen de s’ adapter aux spécificités de chaque élève, la classe reste néanmoins un groupe au sein duquel chaque élève évolue. Ainsi l’enseignement n’est pas individualisé. La pédagogie différenciée permet alors de mettre en place des groupes de besoin. Ces groupes, contrairement aux groupes de niveaux, sont malléables et ponctuels. En d’autres termes, les groupes de besoin sont constitués en fonction des besoins des élèves à un moment donné sur un problème donné. Ils ne constituent en aucun cas des groupes à pérenniser dans l’année.

- En conclusion, le champ de la différenciation pédagogique est vaste et beaucoup de créativité peut s’y développer... La pédagogie différenciée part de la nécessité d’une formation générale de base de même niveau et pose le défi de gestion des différences entre les élèves. "En conséquence, elle soulève le problème de la nature des différences à prendre en compte au sein de la population scolaire pour construire des situations d’apprentissage." (Sabine Laurent). Elle s’adosse naturellement au pari d’éducabilité de toutes les populations, de tous les élèves.

- Références :

- Les pédagogies différenciées, JM Gillig, De Boeck Université.
- Aider les élèves à apprendre ; G. de Vecchi, Hachette Education

Post-Scriptum
- Extrait de Wikipedia, l’enclyclopédie libre http://fr.wikipedia.org/wiki/P%C3%A...
- Extrait de Propos de Sabine Laurent : http://recherche.aix-mrs.iufm.fr/pu...


Meirieu distingue 2 modes de fonctionnement : DIFFÉRENCIATION SIMULTANÉE ET DIFFÉRENCIATION SUCCESSIVE.

- Dans la différenciation simultanée, les groupes travaillent en même temps sur des tâches différentes adaptées à leur besoin du moment. Encore faut-il que le maître ait su reconnaître ces besoins et qu’il ne s’égare pas dans la dispersion (confondre ce qui plaît à l’élève et ce dont il a effectivement besoin pour accéder à un acquis nouveau : rôle des plans de travail, des contrats régulièrement évalués).

- La différenciation successive consiste à proposer aux élèves des situations et des outils suffisamment variés pour que chacun trouve la manière de travailler qui lui convient le mieux : recours au texte, à l’image ; tâtonnement expérimental ; explication magistrale ; recherche individuelle par petits groupes, collectivement...